Je cherchais une librairie indépendante à Angers et j'ai découvert Myriagone. La particularité des librairies indépendantes c'est qu'on y trouve des livres qu'il n'y a pas forcément dans les librairies grand public. Il y a une sélection qui n'est pas forcément guidée par la popularité des auteurs et des autrices mais plus par les idées. Ce sont des endroits importants. Des espèces de contre-pouvoirs. C'est par exemple dans une librairie indépendante située à Saint-Denis (93) que je me suis fait dédicacer mes livres par Virginie Despentes. Après, il y a aussi une réalité économique qui touche les librairies indépendantes. Si elles se contentaient de proposer des livres écrits par des inconnus, elles pourraient s'exposer à une faillite rapide. Du coup, la réalité c'est que sur les ilots centraux, on peut retrouver des maisons d'éditions très connues et des écrivains et des écrivaines célèbres. Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai vu le livre du Prince Harry en vitrine d'une librairie pourtant ouvertement militante. La stratégie c'est d'attirer le chaland avec des gens connus et quand ils font un tour, ils peuvent tomber sur Le syndrome du patron de gauche par exemple.
Ce n'est pas exactement la stratégie de Myriagone. Cette librairie indépendante angevine est plus radicale dans son approche. Dans l'espace principal, il n'y a que des oeuvres de petites maisons d'éditions. Surtout, il y a un choix plutôt restreint. Je ne sais plus où j'ai lu ça mais en gros, il est expliqué qu'ils effectuent une sélection qui correspond 100% à ce qu'ils aiment. Pas de livre populaires ou qui vont faire vendre. Je trouve ça plutôt stylé. C'est le cas du livre qui est l'objet de cet article Anostké de Christophe Ségas (Éditions du chemin de fer). Au tout début, c'est écrit que le livre a été tiré à 1 000 exemplaires. Je ne suis pas dans le monde de l'édition mais j'ai l'impression que c'est très peu.
De quoi ça parle ? (le résumé de l'éditeur)
Les plus vieilles chroniques de la ville d’Eusthènes racontent comment, mille ans auparavant, la déesse Anostké a fait son apparition aux portes de la cité et s’est emparée de la ville pour y imposer ses lois en faisant bâtir aux habitants une Arche qu’il leur faudra adorer. Mille ans plus tard, alors que l’Arche et les commandements d’Anostké ne sont plus qu’un folklore qui n’impressionne guère, les gardes aperçoivent une silhouette qui s’approche des portes d’Eusthènes : la déesse est revenue. Si les adultes résistent, les enfants sont hypnotisés et se rangent les uns après les autres aux côtés de la déesse, contre leurs parents… Les textes de Christophe Ségas sont des miroirs déformants qui se nourrissent de nos peurs, de nos travers pour pointer la folie de nos sociétés déviantes. Après Hors le bourbier qui revisitait de manière opulente le mythe du créateur tout puissant, mi-démiurge, mi-diable, il y a eu Le théâtre des oiseaux qui, sous couvert de fable grotesque, dénonçait le consumérisme forcené et l’annihilation de l’individu dans nos sociétés du spectacle. Avec Anostké, Christophe Ségas s’attaque frontalement, mais de façon toujours aussi loufoque et drôlatique, au sectarisme et à la dévotion, à l’obscurantisme religieux qui nie toute humanité aux humains.
Mon avis
C'est un bel objet avant tout. C'est pas un livre de poche qu'on trimballe partout. On a envie d'en prendre soin. Le papier choisi semble de qualité. Les illustrations de Frédéric Coché aident aussi même si je n'y suis pas sensible.
Le livre est très court et va droit au but. L'installation de l'univers sombre se fait rapidement. Très vite, on se voit dans le village et dans l'ambiance pesante qu'il y a. Vu la longueur, tout se passe à vitesse grand V. C'est presque frustrant ! J'aurais aimé que ça dure 100 pages de plus afin de rester encore plus longtemps dans cet univers étouffant.
Infos
Le livre est dispo sur le site des Éditions du Chemin de fer.