C'est un article de L'Obs où l'autrice Claire Marin est interrogée qui m'a donné envie de lire ce livre. Quand j'ai passé ma commande, enfourché mon vélo et récupéré l'ouvrage à la librairie Millepages, je ne savais pas encore à quel point ce livre me ferait du bien.
Je n'aurais certainement pas acheté et lu ce livre il y a de ça 1 an mais la vie a fait que c'est un sujet sur lequel je me suis pas mal penché on va dire. On trouve tout un tas de ressources en ligne sur le thème de la séparation. J'en ai lu beaucoup. En anglais, en français, sur Quora, Reddit, des sites féminins, sur YouTube ou encore sur Tik Tok. La majorité du contenu m'a semblé plutôt simpliste et proposé par des gourous autoproclamés qui balancent des phrases génériques comme : « Il ou elle ne te méritait pas bla bla bla ». J'imagine que ça marche si ce genre de propos prolifère. Et tant mieux si des gens s'y retrouvent. Pour moi, c'était... bof.
Mais ça, c'était avant de tomber sur Rupture(s) de Claire Marin.
De quoi ça parle ?
« Joyeuses ou tragiques, visibles ou cachées, les ruptures rythment notre existence. Comment les conjuguer avec l'idée de notre identité, une et constante ? Nous révèlent-elles les multiples facettes de notre être ou le fait que nous nous affirmions progressivement, au fur et à mesure de ces « accidents » ? Nous épurent-elles ou nous démolissent-elles ? Pour la philosophe Claire Marin, nous nous définissons autant par nos sorties de route que par nos lignes droites. Certes, naissances ou deuils, séparation ou nouvel amour fragilisent nos représentations, ébranlent nos certitudes. Mais ils soulignent aussi la place de l'imprévisible, et questionnent notre capacité à supporter l'incertitude, à composer avec la catastrophe et, en les surmontant, à parfois démarrer une nouvelle vie. »
Avis
C'était le livre que j'attendais sans le savoir. Il m'a vraiment fait du bien. Si je l'ai entamé en pensant lire des choses sur les ruptures amoureuses, c'est surtout le reste qui m'a aidé à comprendre d'autres événements qui se sont passés dans ma vie. J'ai lu des phrases qui ont mis des mots sur des comportements que j'ai eu dans le passé et que je n'avais jamais cherché à analyser. En un mot et sans trop trahir ce que je raconte dans mon carnet de bord, je n'aime pas les ruptures. Je ne suis pas quelqu'un qui se détache facilement. J'ai évoqué ça une fois dans une story Instagram et une personne m'a dit que ce n'est pas l'impression qu'elle avait de moi. Ça m'a surpris. Mais une fois la surprise passée, je me suis souvenu d'un truc que j'ai lu une fois et qui m'a marqué. Chaque personne a une vision différente de vous et c'est très peu probable que cette vision soit raccord avec l'image que vous pensez dégager. Enfin bref, c'est peut-être une carapace que j'ai mis en place pour me protéger.
Pour vous donner un exemple précis, lorsque j'ai démissionné de mon travail en 2018, j'ai été ému lorsque j'ai quitté le parking dans lequel j'ai fait du skate tous les midis. Je ne suis pas quelqu'un qui se détache facilement. Je suis du genre à m'attacher aux lieux et aux objets. Heureusement, grâce à la méthode Marie Kondo découverte sur Netflix j'ai appris à évoluer sur ce sujet. Je me suis notamment séparé de pas mal de vêtements que je ne mettais plus mais auxquels j'étais très attaché par rapport à ce qu'ils représentaient.
Pour en revenir au livre, la table des matières présente les différents thèmes abordés.
Un passage m'a beaucoup plu dans le premier chapitre. L'autrice évoque un personnage dans un livre de Jean-Paul Sartre.
« Lorsqu'être fidèle à soi demande tant d'efforts, que vivre est une telle imposture rejouée à chaque instant, assumer ses rôles habituels devient impossible. Il faut fuir et trahir ses engagements. [...] Ce qui jusqu'alors m'a nourri, entouré, protégé, désormais me dévore, me consume. »
Dans le chapitre suivant, celui sur la rupture amoureuse, un tout petit passage sur les objets a attiré mon attention. Pour comprendre pourquoi, relisez ce que j'ai écrit au-dessus.
« Les choses, reliques de l'ancienne vie partagée, demeurent tout en changeant de statut. Dans La Femme rompue, Simone de Beauvoir analyse avec froideur la manière dont se délite l'existence d'une épouse quittée. C'est tout un monde commun qui se vide de sa substance, les objets sont creux, comme si la vie désertait les témoins silencieux d'un amour perdu. Les choses ne constituent plus un univers rassurant, elles ne sont qu'une vaine imitation d'elles-mêmes. Que valent encore ces objets s'ils ne sont plus partagés, s'ils ne sont plus que le memento d'un amour mort ? Tout ce qui était familier paraît désormais étranger ou suspect, complice d'une trahison. »
Je n'ai pas d'extrait particulier à sortir du chapitre « Devenir soi » mais je l'ai trouvé très intéressant. C'est seulement la trentaine passée que j'ai amorcé une rupture avec mon moi du passé. Avec la période où j'ai posé les bases de ma vie, vers 18 ans. J'ai eu le déclic un jour où j'étais au restaurant avec des collègues. J'ai raconté une anecdote originale on va dire et ils ont été surpris. Sur le chemin du retour, je me suis rendu compte que je n'étais plus vraiment cet Éric. Il n'est pas mort, il est en moi, il m'a façonné mais ce n'est plus celui que je suis depuis quelques années. Cette rupture avec cet ancien moi a mis du temps à arriver et je le redoutais car c'est violent de capter qu'on est passé à autre chose. Pour résumer, je suis devenu un adulte lol. Certains ont amorcé cette métamorphose tôt dans leur vie, moi, ça m'a pris pas mal de temps. Au moment où j'écris ces lignes, je suis encore en phase d'apprentissage mais je suis bien parti pour être diplômé !
Ce chapitre m'a fait penser aux paroles d'une de mes chansons préférées d'un groupe qui s'appelle Half Hearted Hero.
Enfin, je termine avec un dernier extrait tiré du chapitre « L'être accidenté ».
« Être déplacé, c'est se découvrir autrement et cette fragilité n'est pas seulement une défaillance, elle nous indique d'autre façons d'être, un autre style d'existence. L'expérience de la souffrance interroge cette place que nous avons occupée sans questions. Est-ce vraiment là que nous voulons être ? Est-ce là seulement que nous pouvons être ? L'enjeu est bien de se situer, après une expérience affolante qui nous a désorienté. Si mon corps a été mis « hors circuit », comme le dit Michaux, dans quel cercle l'inscrire désormais ? Quelle pulsation le porte et quel monde cette pulsation anime, ravive ou fait naître ? Si l'habitude façonne notre mode d'être, je peux donner ç mon corps de nouvelles habitudes, m'en servir autrement, explorer mon être gauche et en découvrir l'adresse. [...] Ainsi, j'aurais peut-être l'impression, comme Michaux, " de n'être pas tout à fait passé à côté, de ne pas avoir souffert en vain ". »
Conclusion
C'est le livre parfait si vous êtes dans une période de rupture. Encore une fois, il n'est pas seulement question de rupture amoureuse. Avec son approche philosophique, Claire Marin met des mots sur des situations que tout le monde affronte un jour ou l'autre.
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