Méfiez-vous de la promotion à la télévision. Souvent, dans les programmes dont le but est (même s'ils tentent de le cacher) de faire de la pub à des produits culturels, les présentations sont bâclées. Pour Bande de filles je me souviens de leur passage sur le plateau Grand Journal de Canal + pendant le Festival de Cannes. Les quatre actrices (Karidja Touré, Assa Sylla, Lindsay Karamoh, Mariétou Touré) sont arrivées face à Antoine de Caunes et, sans surprise, elles n'ont pas pu beaucoup parler du film. Le but était juste d'inviter des personnes différentes de d'habitude. La forme donc, pas le fond car on n'a rien appris sur le long-métrage de Céline Sciamma. Quelques mois plus tard, ce mercredi 22 octobre 2014, je lis dans Télérama, un papier de Laurent Rigoulet où il évoque le film en mettant le thème en perspective : ce qu'on appelle un vrai article, pour info. Au journaliste, la réalisatrice/scénariste confie qu'elle a tenté de faire un ''récit initiatique pas si éloigné de ceux de Jane Austen ou Jane Campion''. C'est cette phrase qui m'a donné envie d'y aller le soir-même et l'évocation de films comme Foxfire et Entre les murs de Laurent Cantet.
Avis
Séance de 22h10. La majorité des gens, au courant du long tunnel de pubs qui précède ce pourquoi ils ont payé plus de 10 euros, arrivent tous vers 22h30. Au MK2 Quai de Seine, le public est assez homogène d'habitude, sauf ce soir. A la traditionnelle audience des films d'auteurs s'est greffée des adolescents certainement attirés par leur ressemblance avec les filles de l'affiche. Forcément, l'ambiance dans la salle s'en est ressentie. Certains commentaient à voix haute, d'autres, probablement étrangers aux règles en vigueur, filmaient sans gêne l'écran, ça tchipait, aussi. Tout cela a entraîné un concert incessant de ''chuuuuuuuut'' pendant toute la séance. Chiant, mais malheureusement prévisible. Toutefois, malgré cette confusion, c'est bien de réussir à emmener des gens comme cela dans les cinémas pour voir d'autres pellicules que Fast & Furious ou Scary Movie.
Pour commencer, le titre Bande de filles est un brin mensonger. La bande, pour laquelle les personnes citées plus haut sont venues, est seulement évoquée dans la première partie du film. Elles traînent aux Halles, apostrophent des bandes rivales et se battent. Mais, on se focalise rapidement sur Marieme, le personnage principal. A travers elle, Céline Sciamma tente de montrer l'évolution d'une adolescente à travers son appartenance à différents groupes. En la voyant (regardez juste l'affiche) on pourrait penser qu'on suit une jeune de cité. Oui, mais non. Oui, car elle vit dans une cité mais non car son histoire semble universelle. Elle pourrait concerner toutes les adolescents et les adolescents. A travers les différents groupes auxquels elle appartient, Marieme se cherche une identité à la fois vestimentaire et sexuelle. Tantôt ultra-féminine, tantôt garçon manqué. Mais, au-delà de cet aspect concernant pour les jeunes qui ont entre 16 et 20 ans, j'ai surtout été captivé par sa volonté d'affirmation dans un monde profondément marqué par une domination masculine. En un sens, Bande de filles est un film féministe. Il montre les pressions subies par les jeunes filles de la part des garçons. Sauf que Marieme n'a pas envie de reproduire le modèle. Elle veut s'émanciper. Alors elle tâtonne, se trompe, souvent, recommence, encore et à la fin (et ce n'est pas un spoiler) son cheminement ne s'achève pas mais elle a appris des leçons qui lui serviront à grandir. Et c'est là où on en revient à la référence à Jane Campion, réalisatrice qui aime mettre en scène des femmes fortes et indépendantes.
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En bref : c'est un chouette film engagé, de façon subtile, porté par un scénario efficace et des actrices amatrices convaincantes dans des rôles de composition. Par contre attention à l'effet Spring Breakers où des fillettes pensaient voir leurs stars préférées faire la fête gentiment, cela reste un film d'auteur et il n'est pas question de suivre la vie d'une bande qui met la terreur dans une cité.
Bonus : si vous aimez les films du genre, regardez Foxfire de Laurent Cantet.
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