vendredi 9 décembre 2016

Avis - Les fous du guidon (L'Équipe Explore)

L'Équipe a sorti un format explore vidéo sur le monde des coursiers. Plus simplement, on peut appeler ça un documentaire. Ça dure une vingtaine de minutes. Je l'ai regardé, par curiosité et aussi parce que ça m'intéressait. Par contre, je n'arrive pas à voir si ça a un intérêt si vous êtes hermétiques 1/ au vélo 2/ à ce monde.


Avant d'aller plus loin, je salue le fait que L'Équipe se soit intéressé à cette vraie niche. En journalisme, une niche c'est un monde dont on ne parle jamais dans les médias nationaux. L'univers des coursiers en est une, donc (récemment ça a surtout parlé des coursiers par rapport à la fermeture de Take Eat Easy).


Maintenant que c'est dit, je vais vous dire pourquoi je n'ai pas vraiment aimé ce documentaire. Mais avant tout, il faut que vous sachiez quelque chose sur les documentaires/les reportages... une partie du journalisme. Un journaliste peut faire dire ce qu'il veut à son sujet (peu importe le format). Cela passe par le choix des intervenants, la sélection des citations et ensuite tout ce qu'il y a entre.


Dans Les fous du guidon, un angle précis a été choisi. Le but est de montrer que les coursiers et les gens qui participent à des alleycats sont des fous furieux et qu'ils trompent la mort. Les images sélectionnées pour illustrer cela ont d'ailleurs été bien choisies pour servir cet objectif.

Cet extrait montre des cyclistes griller un feu et obstruer le passage d'une voiture qui a le feu vert
Il y a aussi le côté compétition qui a été mis en avant dans Les fous du guidon. On nous présente un coursier parisien qui participe à une compétition pour aller sur le podium, par exemple.


Ils ont aussi montré le gagnant du championnat du monde des coursiers 2016.


Et ils sont sont aussi entretenus longuement avec le gars qui a remporté l'alleycat à Berlin.


Et puis je passe sur l'histoire de ce coursier de New York City et son histoire de chaîne qui servait aussi à se défendre à l'époque. 


Les auteurs du documentaire ont voulu montrer de la testostérone. Et cet angle est bien servi par les propos de Lucas Brunelle. Un gars qui sur sa chaîne YouTube aime filmer et montrer des séquences spectaculaires. 

Piétons, voiture et... SCOOTER!
Ne vous méprenez pas. Je ne dis pas que ça n'existe pas. Mais c'est, à mon sens, assez caricatural. Trop, peut-être. Une personne lambda qui regarde Les fous du guidon va simplement retenir que c'est un truc pour malade alors que ce n'est pas que ça. C'est un peu comme résumer le mouvement ultras à des débordements. 


Au-delà de ça, il y a un passage qui m'a particulièrement soulé dans les multiples interventions de Lucas Brunelle. À un moment il explique qu'il regrette que ce "monde" ne soit plus aussi underground que quand il l'a découvert. Cette façon de raisonner voudrait dire que d'après lui, il ne faut jamais de renouvellement, que les non-coursiers ne devraient pas participer aux alleycats et que ça serait mieux que les coursiers restent entre eux. Je trouve que c'est un raisonnement de merde. Lors de l'alleycat de la Team Random, il n'y avait pas que des coursiers. Et heureusement. Il y avait (si ma mémoire est bonne), un peu moins d'une centaine de participant-e-s. Et l'organisation était contente de cela. En limitant cet événements aux coursiers, il n'y aurait pas eu autant de monde.

Photo: Waï
Autre raison pour laquelle c'est un raisonnement stupide c'est que l'ouverture de ce monde est aussi profitable aux magasins indépendants. Plus il y a d'adeptes, plus ces boutiques ont de potentiels clients. Je pense à des endroits comme Fixie Warehouse, Bicycle Store, L'Hirondelle et d'autres à Paris.

Quand on regarde ce documentaire, on a l'impression que tous les gens qui roulent dans ce "monde" pensent pareil. C'est faux. Et je peux l'affirmer car j'ai pu le constater lors des fois où je participe au Ride du Mercredi. Ouais, il y en a qui vont chercher l'adrénaline (comme dans les extraits ci-dessus) mais il y en aussi d'autres (dont je fais partie) qui ne sont pas là pour tromper la mort et qui ne cherchent pas à se mettre en danger à tout prix. Comme je l'explique dans cet article, il y a plusieurs façons de griller un feu rouge.

Quand je roule à Paris (où il y a pas mal de trafic) je prends du plaisir. Ouais je trouve ça sympa de se faufiler, d'aller plus vite que les voitures, de tout anticiper ou encore d'éviter les dangers. Mais je ne suis pas près à mettre ma vie en danger. Ce qui m'intéresse avant tout dans le vélo urbain, c'est le côté sportif, je ne cherche pas les sensations fortes. Et je ne cherche pas à prouver quoi que ce soit à qui que ce soit.

>>> [Compte-rendu] Alleycat Team Random

Cela dit, je comprends l'effet de groupe. Je comprends que les vidéos où des mecs risquent leur vie excitent des jeunes (et des moins jeunes). On appelle ça des codes. Il y a en a dans tous les milieux. Malheureusement, quand ils sont montrés en exemple, ça peut causer des situations dangereuses et aussi donner une mauvaise image des cyclistes.

Pour finir sur le documentaire, j'ai une interrogation:


OÙ SONT LES FEMMES? Aucune femme n'est interrogée. Mais bon, encore une fois le but du documentaire était de montrer un monde plein de testostérone, un monde de bonhommes qui n'ont peur de rien. Bah oui, les femmes sont fragiles... Si ce dernier point vous intéresse, je vous invite à lire cet article de Rue 89.

Conclusion
Vouloir mettre en lumière ce monde est une idée louable mais je déplore l'aspect sensationnaliste et spectaculaire du documentaire.

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